Assis sur un banc près d’un grand jet d’eau, j’essaie de savourer la  fin de la journée. Mais mon esprit me fait défaut car je commence à parler toute seule. Bizarre. Je n’entends pas le son de ma voix.

Je tourne ma langue sept fois avant de parler comme la première fois. Car le chagrin m’a rendu muet. J’ai bouclé mes mâchoires. Je ne m’exprime plus. Ma douleur est intense. Ma souffrance s’amplifie et devient épouvantable.

Oh Seigneur ! Me dis-je en moi-même. Voilà un monde plein de vies. Les gens circulent sans crainte. De grands sourires aux visages. Je n’entends même pas le cri ou les pleurs d’un enfant alors que c’est toute une foule de gens que je vois  passer devant mes yeux. Qu’est-ce qu’ils ont dans leur tête ? je ne sais pas.  Et dans la mienne ? C’est vide mais très lourd par la pensée. Je suis comme un homme au bout de son  chemin. Qu’est ce qui me retient ? Ton Esprit ? Mon esprit ? Je me sens comme un rien. Impuissant. Mais je ne ferai pas le grand saut pour être chez toi. Je refuse car j’aimerai que tu me dises ce que tu penses de mon pays. Car il se détruit. Il est détruit. Un grand malheur s’est abattu. La nation est devenue aveugle à cause de l’égoïsme et de la corruption. Malfaiteurs et criminels se réjouissent. Ils se prennent pour des dieux. Rien ne les arrête. Ils viennent. Ils frappent. Ils cassent. Ils tuent. Les blessés ont le visage mutilé. Le corps ravagé. Des plaies ouvertes. Profondes. Même des balles ont tourné à l’intérieur des corps sans jamais sortir. Horreur total pour les survivants. Autrefois, on disait que les bandits dévalisaient sans tuer et partaient. Maintenant ils sont là pour réduire en cendres tout sur leur passage. Qui entend l’appel au secours des victimes ? Souvent il est déjà trop tard. Désemparés qui les aidera ? Les criminels sont bien rusés. Et voilà des porteurs de paix arrivent paraît-il. Mais ce sont de faux porteurs de paix. De faux porteurs de salut.

Toujours assise sur ce banc où je suis de mon regard les passants. Je reste muet car en recevant la joie des passants j’ai senti qu’en moi elle est teintée de cris venant du pays lointain isolé, écrasé  et dans la détresse totale. Qui sauvera ?

Place de la Comédie 29.09.2012